Les souvenirs d'enfance : pourquoi sont-ils importants?

Les souvenirs d’enfance, que vous évoquent-il ? Des moments nostalgiques devant un album photos ? Des repas au cours desquels on se remémore des anecdotes ? Des images qui reviennent de temps en temps ?

Nos propres souvenirs restent bien au chaud dans notre esprit, ou au contraire dans un coffre que l’on ne souhaite guère trop rouvrir.

 Parfois, ils sont rapidement évoqués : « mon enfance ? Oh il n’y pas grand-chose à en dire » ou « j’ai eu une enfance heureuse ». Ils cachent en réalité des vérités souvent différentes.

Innocence, premières fois, liberté, accomplissement, blessures… En quoi les souvenirs d’enfance nous définissent ? En quoi sont-ils essentiels ?

Nos premiers souvenirs

Quels est vos premiers souvenirs ? Ils peuvent être clairs, précis, inscrits dans votre mémoire, comme ils peuvent se montrer plus flous, reposant en partie sur ce que la famille vous a raconté à partir d’une photo. Car les premiers souvenirs remontent à l’âge de 3-4 ans, mais cette moyenne connaît des disparités parfois importantes. Avant cet âge, on évoque l’amnésie infantile, le cerveau n’étant pas assez mature pour stocker des souvenirs.

Si les premières années ne laissent en général que peu d’empreintes conscientes, elles occupent une place tout à fait à part, et primordiale, dans notre vie. Ce sont les premières pierres, sur lesquelles la sécurité affective se construit. Le monde sensoriel s’ouvre à nous, mais aussi les premières insécurités, plus ou moins marquantes.  L’ouvrage « Les 1000 premiers jours de l’enfant » du psychiatre Boris Cyrulnik confirme le socle que représente cette période cruciale de la vie.

Alors même si ce « commencement » reste invisible à notre esprit, accordons-lui l’importance qu’il mérite dans notre cœur.

Notre histoire parmi les autres histoires

On aime choyer ses souvenirs d’enfance, car notre identité et notre maturité émotionnelle se sont construites sur ce vécu personnel. Ils expliquent une part de nos réactions d’adultes, et parfois de notre personnalité. Ils influencent les trajectoires que nous prenons, sans que nous en ayons conscience bien souvent.

En échangeant ces souvenirs avec les autres, nous consolidons nos liens sociaux, nos liens affectifs. Une région commune, un loisir commun, un voyage… et les connexions se font spontanément, elles animent là encore nos sens.

Nous sommes des êtres de liens, et nos souvenirs représentent un fondement sur lequel nous nous sommes construits, dans notre histoire, dans notre narration.

Parmi les centaines de petits accomplissements et d’expériences que nous avons vécus en grandissant, certains ont revêtu une plus grande importance. Ils demeurent en nous comme des petits trophées, des repères émotionnels, des points d’ancrage.

Leurs zones de résonances avec des personnes que nous rencontrons sont nombreuses. Elles tissent des toiles, des sourires, des instants de complicité. Elles représentent également une force face aux défis de la vie.

Les madeleines de Proust : un trésor sensoriel

Une odeur, la vue de la mer, une musique, une lumière de fin d’après-midi… et le souvenir revient. Intact. Nous avons vécu ce moment-là, pleinement, si pleinement qu’il s’est inscrit dans notre corps.

Les madeleines de Proust sont souvent savoureuses, elles nous transportent dans un passé intense, vers des évènements qui nous ont marqués par nos sens.

J’ai en moi-même plusieurs. Ma grand-mère nous offrait de la brioche grillée au petit déjeuner. Cette odeur-là reste ancrée en moi, elle contient du bonheur, de la générosité, un extra que l’on ne faisait pas tous les jours. Lorsque je sens cette odeur de brioche grillée, je me revois dans la petite cuisine de ma grand-mère, prenant ces tranches de brioche, avec de la confiture étalée dessus – ce moment-là représentait un luxe sans égal pour la petite fille que j’étais.

L’odeur des mûres en train de cuire reste aussi pour moi un souvenir indélébile. Je revois ma mère les remuant patiemment pour en enlever les pépins, puis les verser dans un grand récipient. Elle mélangeait alors ce bouillon violet dont s’échappaient des effluves enivrants. Ce parfum-là, de mûres fraîchement cueillies et cuites, détenait une richesse gustative incomparable. Rien à voir avec les pots de confiture industriels, presque inodores lorsqu’on ouvre le bouchon.

Et vous, quelles sont vos madeleines de Proust, si vous les avez identifiées, si vous avez déjà vécu ces réminiscences sensorielles extraordinaires ?

Remémorez-vous ces instants où vos sens étaient sollicités, et le plaisir que cela a généré.

 

L’ombre et la lumière

On aimerait que chaque personne n’ait que des souvenirs sucrés, des sourires en évoquant son enfance. Ce n’est pas toujours le cas. Certaines blessures restent vives, certaines images encombrantes. Chaque personne fait un chemin personnel pour surpasser ces mauvais souvenirs, leur donner une sorte de sens, lorsque c’est possible.

Écrire ses souvenirs douloureux d’enfant, les déposer, peuvent contribuer à les faire se transformer en cicatrices, pour qu’ils ne restent pas des plaies.

L’amnésie traumatique est également mieux connu : face à des évènements particulièrement graves, l’individu peut les occulter et ne pas s’en souvenir. La levée de cet amnésie survient parfois des années après.

L’impact des expériences vécues dans l’enfance sur la santé globale de l’adulte est capital. Alors, que ce vécu soit fait d’or ou de boue, malaxons le, faisons en une œuvre qui nous permettra d’avancer le plus sereinement possible dans notre vie d’adulte.

Qu’ils soient positifs ou négatifs, les souvenirs d’enfance font partie de notre identité. Sorte de fil d’Ariane, ils mettent à la lumière le chemin parcouru depuis les premières années jusqu’à la vie d’adulte. Leurs récits comportent une richesse singulière, faite de vécu personnel et d’histoire partagée.